16 mai 2024
Associations

Organisation et changement social

À propos de l’ouvrage Sociologie de l’association: des organisations à l’épreuve du changement social, de Jean-Louis Laville et Renaud Sainsaulieu, éditions Desclée de Brouwer, 1998, 403 pages.

Compte-rendu paru dans les pages Carrière du journal Le Temps, rubrique Le livre de la semaine, le 6 novembre 1998.

Les analyses d’organisations à but non lucratif – associations – sont souvent effectuées à l’aide des mêmes outils que ceux qui servent à l’analyse d’organisations à but lucratif – entreprises. Comme s’il s’agissait d’organisations marginales! Pourtant, elles représentent un volume d’environ huit cent mille emplois pour renvoyer au cas français. La démarche des auteurs de cet ouvrage répond ainsi à un double souci: «donner à lire et à comprendre quelques-unes de ces expériences associatives, en proposant des repères et des cadres de référence; mais aussi, énoncer une problématique générale qui puisse servir de fondements à l’élaboration de modèles de fonctionnement et se décliner en méthodes d’investigation pour une conduite du changement dans les univers associatifs». L’ouvrage est organisé en trois parties. Dans une première, réflexive, Jean-Louis Laville aborde différentes réponses apportées à la question: pourquoi des associations? A partir de l’opposition, classique en sociologie, entre deux types de relations sociales fondamentaux: société et communauté. Sauvagement résumé: le changement apporté par la modernité entraîne une émancipation à l’égard de la coutume et de la tradition, la société mettant à mal les liens communautaires; ceux-ci se recréent alors par le biais des organisations non marchandes, notamment. Jean-Louis Laville inscrit le fait associatif dans le cadre d’une réflexion sur la démocratie dans les sociétés modernes, la création associative ne pouvant être comprise, selon lui, sans la référence au bien commun. Dans une deuxième partie, pratique, les auteurs présentent quatre cas d’associations, analysées à partir d’angles théoriques complémentaires: contingence, sociotechnique, analyse stratégique, approche culturelle. La troisième partie en est une de synthèse. Analyser des associations, insistent les auteurs, commande, en premier lieu, de comprendre en quoi elles se distinguent des entreprises: dans celles-ci, «l’acteur social se voit imposer des règles du jeu qui sont indépendantes de sa volonté»; dans celles-là, «le sujet qui s’engage dans une association le fait par adhésion volontaire». Il faut donc porter une grande attention à la culture et aux modalités identitaires, sentiment d’appartenance, en particulier. Analyser les associations commande, en second lieu, d’intégrer les aspects historiques, notamment les relations entretenues au fil du temps avec les pouvoirs publics, lesdites associations ne pouvant être réduites à leur seul fonctionnement organisationnel.